Chapitre 2: L’annonce aux Matlock

La plupart des personnages de cette fiction appartiennent à sa talentueuse auteure : Jane Austen. Cette histoire et les personnages inventés sont cependant ma propriété et selon les droits d’auteur, je n’en autorise aucune reproduction et/ou utilisation, qu’elle soit totale ou partielle.

O&P

Un grand merci à Lenniee pour la relecture de ce chapitre.


La sonate de l’amour II : à la conquête du bonheur

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Chapitre 2 : l’annonce aux Matlock.

Dès le lendemain matin de sa visite à Longbourn, Darcy fut très occupé. Tout d’abord il prit rendez-vous avec son avoué afin de préparer le contrat de mariage, il avait promis à Mr Bennet de l’établir dès son retour. Ensuite, il rédigea quelques lettres pour annoncer ses fiançailles à ses proches, il attendrait que les courriers arrivent avant de faire publier la nouvelle dans les journaux. Il aurait souhaité attendre encore avant d’exposer Elizabeth aux vipères de la haute société, car il savait que dès que la nouvelle serait rendue publique, elle serait épiée, scrutée, critiquée par jalousie et par dépit. Mais il n’y avait pas moyen d’y échapper. Il se disait aussi que Lady Catherine n’allait pas bien prendre la chose et s’attendait à recevoir une réponse des plus acerbes. Puis il se rendit chez les Fitzwilliam pour la même chose, il désirait le faire de vive voix car ils étaient ses parents les plus proches et les plus chers après Georgie. Il savait qu’ils seraient d’abord étonnés et heureux de savoir qu’il avait enfin trouvé chaussure à son pied, mais qu’ensuite il rencontrerait une certaine réticence en apprenant qu’Elizabeth n’appartenait pas à leur rang.

Il ne pouvait que faire de son mieux pour les convaincre de la valeur de sa bienaimée et de leurs sentiments réciproques et sincères.

Il était installé dans l’un des fauteuils du salon jaune avec son oncle et sa tante assis en face de lui sur un divan, un domestique venait d’apporter du thé, des biscuits et des sandwichs.

– Alors Darcy, quel bon vent vous amène de si bon matin ? demanda Lord Fitzwilliam avec bonne humeur.

– Je vais me marier, répondit simplement Darcy sans préambule en buvant une gorgée de son thé.

– Oh, Fitzwilliam, quelle heureuse nouvelle ! s’écria Lady Claire en joignant les mains, elle était encore un peu affaiblie par sa récente maladie et c’était le genre de distraction dont elle avait besoin pour se rétablir complètement.

– Oui en effet, nous avions peur que vous finissiez en vieux célibataire endurci, taciturne et renfrogné, le taquina le comte avant de demander : alors qui avez-vous finalement choisi, mon garçon ?

– Miss Elizabeth Bennet, répondit succinctement Darcy un peu tendu en reposant sa tasse sur le guéridon à côté de lui.

Un bref silence suivit son annonce.

– Bennet comme les Bennett de Bristol ? s’enquit l’oncle de Darcy, je ne savais pas qu’ils avaient une fille d’âge nubile.

Darcy s’éclaircit la voix avant de répondre, car sa gorge s’était serrée d’appréhension.

– Non… c’est Bennet, avec un seul t, de Longbourn dans le Hertfordshire.

– Bennet de Longbourn… Hertfordshire, réfléchit la comtesse en tapotant son menton avec son index droit, ce nom ne me parle point, quelles sont leurs relations ?

– La sœur aînée d’Eliz… hum, il se racla la gorge, de Miss Bennet est mariée à Bingley, tenta-t-il, sachant que c’était bien maigre.

– Votre ami, le nouveau riche ? voulait confirmer la comtesse sur un ton un peu dédaigneux.

– C’est bien cela, Darcy était de plus en plus mal à l’aise avec cette ligne de questions qui ressemblait à un interrogatoire.

– Alors peut-être des relations, même éloignées, dans la bonne société ? continua Lady Claire très désappointée, car elle tenait beaucoup à son rang et celui de sa famille.

– À dire vrai, ils n’en ont aucune, clarifia-t-il en faisant tournoyer sa chevalière.

– Cette famille ne fait donc point partie de notre cercle, en déduisit-elle avec une déception perceptible dans la voix.

– Le père de ma fiancée, Mr Thomas Bennet, est un gentleman farmer tout comme moi, défendit Darcy qui se tendit davantage.

– Son domaine est-il important ? demanda le comte de Matlock avant de croquer dans un biscuit.

– C’est le deuxième en taille du comté, répondit Darcy voulant rester assez vague. Il se tortilla inconfortablement sur son siège devinant la question suivante. Il ne fut pas déçu.

– Quels revenus génère-t-il et quel est le montant de la dot de la demoiselle ? questionna le compte.

– Entre deux et trois milles livres de rentes pour le domaine, quant à sa dot, mille livres, je pense.

– Mais c’est une pitance ! s’exclama la comtesse, comment est-ce possible? Et qui est donc sa mère, sa famille est-elle donc si désargentée aussi ?

– Sa mère n’appartient pas à la gentry, ma tante, répondit Darcy plus sèchement qu’il ne l’avait voulu.

– Alors que fait le père de Mrs Bennet ? s’enquit le comte curieux.

– Son défunt père était avoué.

Lady Claire porta un regard glacial sur Darcy, sa posture encore plus droite.

– Un avoué ! Fitzwilliam, comment pouvez-vous considérer de vous lier à une famille sans fortune, ni relations… commença Lady Claire en lançant une main en l’air d’indignation. Vous aurait-t-elle donc compromis ?

– Absolument pas ! répondit Darcy tout aussi indigné en se redressant à son tour sur son siège, Elizabeth est une femme remarquable, intègre, intelligente, pleine de bonté…

– Je l’imagine bien volontiers et aussi probablement très intéressée par votre situation ! rétorqua-t-elle d’un air pincé. Mais enfin, mon cher neveu, je vous pensais plus perspicace, vous aviez montré dans le passé davantage de bon sens à ne point vous laisser duper par les minauderies d’une chasseuse de fortune…

– Je ne vous permets pas, madame, avec tout le respect que je vous dois, d’insulter ma future épouse avant même de l’avoir rencontrée, interrompit Darcy en serrant les poings. Je vous assure qu’elle n’est pas ce que vous croyez et certainement pas une chasseuse de fortune !

– Comment pouvez-vous en être si sûr ? intercala le comte, inquiet, tout comme son épouse de voir son neveu préféré être piégé par l’une de ces intrigantes.

– Elle me l’a prouvé.

– Ah, et quel genre de preuve ? demanda le comte intrigué.

Darcy resta silencieux, le temps de réfléchir à sa meilleure option. Il était frustré de ne pas réussir à les convaincre, alors comment y parvenir ? Comment leur prouver qu’Elizabeth n’était point vénale ? Il était très réservé sur sa vie privée, même avec son cercle d’intimes, pourtant il ne voyait qu’une seule façon de les persuader.

– La première fois que je lui ai fait ma demande au printemps dernier, elle a refusé, lâcha-t-il en se levant pour se diriger vers la fenêtre, les mains derrière le dos, mal à l’aise avec ce dernier aveu.

– Oh ! s’étonna le couple en chœur qui resta coi quelques instants en se regardant.

– Mais alors pourquoi a-t-elle changé d’avis ? reprit Lady Claire bien décidée à trouver la faille.

Darcy fut alors obligé de révéler certains détails qu’il aurait préféré taire. Il raconta, tout en allant et venant dans la pièce, certains évènements, notamment son attitude déplorable envers Miss Elizabeth et ses proches, son insultante première demande en mariage. Puis comment il avait réalisé ses erreurs. Enfin, la rencontre d’Elizabeth avec Georgiana lors du mariage de son meilleur ami Bingley et l’épanouissement de leur amitié à Pemberley. Toutefois, il passa sous silence le fait que Richard avait aussi développé des sentiments envers la jeune femme, il ne voulait pas infliger davantage de peine aux parents de son cousin toujours porté disparu. En outre, il n’était pas entièrement réconcilié avec lui-même de ce qu’il considérait encore être comme une trahison envers Richard. Bien qu’il n’aimât pas la dissimulation, il ne parla pas non plus du fait que le domaine des Bennet n’avait pas d’héritier direct et reviendrait à un lointain cousin qui n’était autre que le pasteur de Lady Catherine. Il serait temps de leur révéler plus tard, cela faisait déjà beaucoup à digérer pour ses aînés. À la fin de son récit, il attendit avec trépidation leur réaction.

Finalement, le comte éclata d’un grand rire franc en observant son neveu, habituellement si fier et si sûr de lui, se montrer à cet instant si humble et contrit.

– Vous avez piqué ma curiosité Darcy et j’ai maintenant hâte de rencontrer cette créature qui a osé vous rejeter de la sorte et qui vous a poussé à descendre enfin de votre piédestal.

– Je pensais justement vous la présenter, si vous êtes bien évidemment d’accord tous les deux, demanda Darcy en implorant du regard sa tante d’y concéder aussi. Elle est actuellement à Londres en visite chez sa sœur.

– Très bien, je vois que je n’ai plus qu’à me plier, déclara Lady Claire mécontente. Quand envisagez-vous la rencontre ?

Darcy se pressa de répondre avant qu’elle pût les inviter chez eux. Il préférait que la rencontre se passât chez lui où il serait plus à son aise, et il était sûr que ce serait le cas pour Elizabeth aussi. Il pouvait en plus compter sur l’appui de Georgiana.

– Je vous remercie ma tante ! Je pensais vous inviter à venir prendre le thé à Darcy House, après-demain si vous êtes disposés ?

Les Matlock se consultèrent rapidement et la rencontre fut fixée pour le surlendemain. Mais Lady Claire espérait encore faire changer Darcy d’avis alors elle reprit.

– Mais avez-vous pensé à Georgiana et aussi à vos futurs enfants ? Cette mésalliance risque fort de leur porter préjudice et de diminuer grandement leur prospection lors de la recherche de leur propre partenaire dans la vie.

– D’ici que nos enfants grandissent, les origines modestes de Miss Bennet seront oubliées une fois qu’elle aura conquis – ce que je ne doute aucunement – une grande partie de la bonne société ; de même pour Georgie, trois ou quatre ans devraient suffire à faire oublier les origines modestes de la famille Bennet avant qu’elle ne se marie.

– Darcy n’a pas tort ma chère, d’ici-là, les commères de l’Almack auront bien d’autres croustillantes affaires dont elles pourront se repaître, et je ne dis pas cela pour vous, ajouta le comte en regardant son épouse qui faisait une moue. Un scandale en chasse toujours un autre.

– Je vous remercie de votre soutien, oncle Henry, mais mon mariage n’est pas une scandaleuse affaire, rétorqua Darcy quelque peu blessé.

– Ne vous offensez pas, mon garçon, c’était une façon de parler, rassura le comte.

– Je reste convaincue que vous auriez pu trouver les mêmes qualités chez une jeune fille de la bonne société, ajouta Lady Claire qui ne renonçait pas à sa bataille.

– Vous savez bien que j’ai cherché ces dernières années et qu’aucune n’a réussi à me conquérir.

– Ne pouviez-vous pas alors simplement accomplir votre devoir envers votre famille en contractant un mariage de convenance ?

– Et renoncer à l’amour et au bonheur ? Que nenni ! répondit Darcy avec conviction.

– L’amour naîtrait ensuite, c’est bien ce qui nous est arrivés à votre oncle et moi-même, répondit-elle en regardant son époux tout en plaçant une main affectueuse sur son bras, n’est-ce pas mon cher ?

– Bien sûr ma mie, lui répondit-il d’un ton tendre en recouvrant sa main de la sienne.

– C’est une chance, mais ce n’est pourtant pas le cas de chacun. Il n’est pas besoin de chercher bien loin, que dire de la félicité de Milton et de Lady Susan ? Darcy devenait de plus en plus piquant, cherchant à défendre sa position avant de conclure en assénant son dernier argument : de toute façon mon honneur est engagé, car j’ai déjà demandé sa main auprès de Mr Bennet et j’ai obtenu sa bénédiction. De plus, j’ai déjà écrit à tous mes proches pour leur annoncer mes fiançailles.

– Vous auriez pu nous consulter avant, remarqua le comte un peu vexé en comprenant que son neveu les avait mis devant le fait presque accompli.

– Je ne voudrais pas être irrespectueux, mais je suis majeur et responsable, je ne pense donc pas avoir besoin de votre consentement, ne vous en déplaise. Darcy était sur la défensive.

– Mais de notre conseil, vous ne pouviez vous passer, répliqua sèchement Lady Claire.

– J’en conviens bien volontiers, mais l’aurais-je entendu plus tôt rien n’y aurait fait, car ma décision était prise.

– Nous n’avons plus qu’à espérer que vous ne regretterez pas votre choix, dit le comte en soupirant, jouant une fois de plus l’apaisement. Il savait très bien que Darcy resterait ferme dans sa décision il connaissait par cœur son fort caractère.

Lady Claire n’ajouta plus rien, mais montra ostensiblement sa désapprobation en affichant un visage fermé. Darcy ne s’attarda pas et dès qu’il fut parti, les Matlock se confièrent leurs craintes respectives.

– Ma chère Claire, vous marchez sur des œufs, vous savez que mon neveu est très obstiné lorsqu’il a une idée en tête.

– Bien sûr Henry, mais il faut bien que quelqu’un le ramène à la raison, car en l’occurrence il pense davantage avec son cœur, voire avec une autre partie de son anatomie, qu’avec sa tête !

– Comme vous y allez, il n’est pas un jeune écervelé de dix-sept ans se comportant comme un étalon qui ne sait point se contrôler en présence d’une jument en chaleur, tout de même ! Au contraire, il a toujours été bien trop mûr et trop sage pour son âge… Même lorsqu’il était aussi jeune, et que la partie de son anatomie à laquelle vous faites référence était bien plus difficile à réfréner avec la montée de sève, comme vous pouvez sans doute vous rappeler…

Lady Claire rougit légèrement à l’allusion de son mari à leur jeunesse, mais elle reprit immédiatement le cours de son discours.

– Mais enfin, ne me dites pas que vous vous réjouissez à l’idée qu’il se marie tellement en dessous de sa condition, de notre condition.

– Non, bien sûr que non. Mais n’avez-vous point remarqué comment il avait eu l’air si malheureux en mai dernier ? J’en vois maintenant la raison, cela doit correspondre plus ou moins avec le rejet de cette demoiselle. Et avouez que c’est tout de même singulier, je n’imaginais pas qu’une jeune femme refuse une telle offre si convoitée par d’autres. Cela démontre une intégrité certaine.

– Peut-être, cela demande à être vérifiée. Cela pourrait tout aussi bien révéler un caractère inconsistant ou naïf et ne résout de toute façon pas le problème de cette mésalliance. Vous savez bien, Henry, que cette Miss Bennet sera perçue comme une mercenaire et sera mal accueillie dans notre cercle, voire ostracisée.

– Ne tient qu’à vous de lui apporter votre soutien, dit-il avec un demi-sourire.

– Il va sans dire que si Darcy persiste dans cette folie, j’afficherai publiquement mon approbation et mon soutien, il peut servir de faire partie du cercle très fermé des commères de l’Almack, le piqua-t-elle avant de terminer, mais en privé personne ne m’y obligera, pas même vous mon cher.

– J’en suis fort aise.

L’une des craintes de Lady Claire était que Darcy se fût laisser embobeliner. Il était d’une nature passionnée depuis sa plus tendre enfance et lorsqu’il aimait c’était avec de profonds sentiments et sans réserve. La perte de sa mère, puis celle de son père l’avaient laissé meurtri, depuis, il avait adopté une humeur bien souvent trop sombre et un caractère taciturne, il avait perdu cette légèreté et cette insouciance inhérentes à la jeunesse et cela s’était empiré lorsque Georgiana avait failli perdre la vie l’an dernier. Au-delà de cette mésalliance elle avait encore plus peur de le voir souffrir si ses sentiments n’étaient point réciproques. Toutefois, elle n’était pas encore prête à l’admettre étant d’une nature fière, elle ne voulait pas montrer de faiblesse, la disparition de son cadet avait déjà suffisamment révélé sa fragilité.

Quant à Darcy, il fut quelque peu soulagé d’avoir annoncé la nouvelle de ses futures épousailles même si, comme il s’y était attendu, il avait rencontré une farouche opposition surtout de la part de Lady Claire. Il savait, et pour cause, qu’Elizabeth avait suffisamment de caractère et de personnalité pour ne pas se laisser intimider par la comtesse, mais il devrait la préparer à une entrevue qui ne serait pas des plus agréables. Il espérait aussi que sa fiancée ne changerait pas d’avis si elle se sentait rejetée par sa famille pour évier de lui nuire.

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Dans le prochain chapitre, ce sera au tour de Caroline d’apprendre la nouvelle, quelle sera sa réaction?

Chapitre 2 à venir

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